Sunday, June 9, 2013

Neil Young and Crazy Horse à Bercy

Je ne parle pas souvent des concerts auxquels je vais, mais là je n'avais vraiment pas le choix... Je n'avais jamais vu Neil Young sur scène, je n'en attendais pas grand chose (je me suis dit que ça serait du rock dégueulasse bien fait vu que c'était avec Crazy Horse), et j'étais bien loin de m'attendre à l'expérience mystique à laquelle j'ai eu droit.
Pour remettre les choses à leur place : Crazy Horse est le trio qui accompagne Neil sur scène et sur album depuis 1969. Ils ne sont pas toujours ensemble, mais quand ils s'énervent c'est la fête de la guitare fuzz et des solos de vingt minutes. Leurs heures de gloire sont Rust Never Sleeps en 1979, Ragged Glory en 1990 et il faudra sans doute y rajouter Psychedelic Pill en 2012 à cause de cette tournée incroyable. D'ailleurs la majorité de la setlist est tirée de ces trois albums, à l'exception de quelques titres plus connus du grand public que Young consent à faire pour ne pas complètement s'aliéner les 17 000 personnes qui remplissent Bercy ce jeudi 6 juin (Cinnamon Girl, Heart Of Gold, Rockin' In The Free World et sa reprise de Blowin' In The Wind qu'il joue maintenant depuis belle lurette).

Première constatation : Neil nous a fait un très joli cadeau en amenant Los Lobos dans se bagages. Le groupe de rock latino se charge de la première partie et, malgré le peu de réactivité du public, enchaîne un set très rock gorgé de guitares crunchy avec une mention particulière au sublime Kiko And The Lavender Moon.
Deuxième constatation : Neil Young est venu avec le décor qui ornait la scène en 79, c'est-à-dire quatre amplis factices de six mètres de haut (deux stacks Fender Bassman et deux combos Fender Deluxe Tweed) et un pied de micro à peu près aussi haut. Dès les premières notes de Love And Only Love, impossible de ne pas scotcher complètement : la voix de Young est la même qu'il y a cinquante ans, toujours aussi irréelle, le son est incroyablement bon et clair à la fois, et le groupe joue comme un seul homme, avec mention spéciale pour le guitariste rythmique Frank Sampedro (armé d'une Les Paul Gold Top à deux P90 et chevalet wraparound) qui assure sans jamais mettre un coup de médiator en trop. Mais le plus incroyable, c'est le jeu en solo de Neil lui-même. Je savais qu'il pouvait s'abandonner à des improvisations bien barrées maltraitées au Bigsby avec un phrasé ultra particulier qu'a repris mot pour mot J. Mascis de Dinosaur Jr, mais je n'imaginais pas qu'il se lance avec un tel abandon sauvage. C'est sale, approximatif quand il faut, et de temps en temps il tombe sur une note qui éclaire tout. Derrière, le groupe joue avec un équilibre ultra fin entre assurer de manière stable et rester aux aguets pour suivre le patron.

Les moments forts de la setlist ne sont pas forcément les meilleures chansons : les jams à deux accords tirés du dernier album sont un véhicule parfait pour ces escapades lyriques. On retiendra Walk Like A Giant et ses dix minutes finales de larsen dignes d'un concert de musique concrète, Powderfinger et sa mélodie simple mais imparable, et l'inédit Singer Without A Song pour lequel Neil s'installe au piano et que l'on croit tout droit sorti de Harvest. La guitare star du concert est bien sûr Old Black (voir réplique à gauche), une Les Paul Gold Top de 53 à l'origine repeinte en noir, puis modifiée avec un Bigsby et un micro de Firebird en position aigue. Neil la traîne depuis 69 et il est clair que l'alchimie entre le musicien et son instrument est ici à son apogée. D'ailleurs, pour les morceaux en Drop D, il passe sur une Gold Top modifiée de la même manière, une sorte de Old Black bis... Niveau ampli, les interviews révèlent qu'il se branche sur une Fender Deluxe tweed de la fin des années 50 : il suffit d'essayer une combinaison similaire pour se rendre compte d'à quel point ses doigts sont bien plus responsables.

3 comments:

  1. Que ça devait être beau... Tu devais avoir de bonnes jumelles pour distinguer le wraparound ! :))

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  2. Il ne faut pas que tu oublies la tempête aussi ! FOUFOU le Neil !

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  3. Et cette petite armée de savants fous qui amusaient la galerie de leur choré foutraque.
    Une belle nuit!

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