Saturday, November 22, 2014

Le problème de John Mayer

Non, cet article ne parlera pas du physique de John Mayer qui, comme vous pouvez le constater sur cette cover de Rolling Stone datant de 2010, a de quoi filer des complexes à Keith Richards lui-même (et ça n'est pas peu dire). Cet article ne parlera pas non plus d'à quel point sa musique accompagne à merveille un voyage en ascenseur, même sur plusieurs dizaines d'étages. Non. Assez de ce genre de bassesses ici, si les guitaristes se critiquaient entre eux ça se saurait. L'objet de cet article est la controverse autour de deux simples tweets signés de la main de la star internationale. Deux tweets datés du 13 Octobre (oui je sais je suis long à réagir) et retweetés par plus d'un miller de fans. Que disent-ils donc ? Le premier : "Heads up to anyone thinking about owning my signature Stratocaster, they’re no longer being made and I’m no longer a Fender artist." Et le deuxième : "I love Fender guitars and will continue to play them, but the fact is that the company as it is today isn’t the same one I started with.". Traductions : "à tous ceux qui voudraient acheter ma Fender Stratocaster signature : ils ne la fabriquent plus et je suis plus un artiste Fender." et "J'aime les guitares Fender et je continuerai de les jouer, mais le fait que l'entreprise telle qu'elle est aujourd'hui n'est plus la même que celle avec qui j'ai commencé".
Un peu d'histoire pour commencer : le modèle signature de John Mayer est sorti chez Fender en 2006, à une époque où la firme californienne n'était pas du tout gérée de la même manière. à l'époque, le patron avec qui Mayer a donc sans doute négocié les termes de son contrat) était Bill Schultz, alias l'homme qui a sauvé Fender des griffes de CBS en devenant CEO (PDG aux USA) en 1981 puis en rachetant la marque en 1985. L'ère Schultz a été marquée par les premières bonnes rééditions vintage, les lancement de Squier, des nouveautés intelligentes et l'ouverture du Custom Shop. Autant dire qu'on doit la plupart de ce qui est bon à l'heure actuelle chez Fender à Schultz. La même année que le modèle signature Mayer, Schultz a pris sa retraite et c'est alors Bill Mendello qui a été nommé CEO. Mendello faisait lui aussi partie des acheteurs de Fender en 1985 et faisait donc partie des gardiens du temple, soucieux de conserver l'héritage de la marque. D'ailleurs il s'appelait aussi Bill, c'est dire.
Puis en 2010, Mendello a lui-même pris sa retraite et c'est Larry Thomas qui est venu le remplacer. Changement de décor radical : Thomas ne venait pas de l'intérieur, il a été CEO de la chaîne de magasins Guitar Center juste avant. Un businessman donc, un vrai, même si on reste dans le domaine des instruments de musique. Pendant la présidence de Thomas, Fender se retrouve dans une situation financière extrêmement délicate (des millions de dollars de dettes, plusieurs entrées en bourse ratées), et ce dernier a pris sa retraite en avril 2014. Un mois plus tard, Fender annonce qu'il vend la marque Guild au groupe Cordoba Music. En apparence donc, le groupe Fender lâche du lest et tente de se refaire une santé en se débarassant d'une marque qu'il estime moins précieuse que les autres marques qu'il possède, comme Gretsch, Jackson, Charvel et Hamer. Si on y regarde plus près, on s'aperçoit que le président de Cordoba Music n'est autre que Jonathan Thomas, le fils de Larry ! ça laisse un drôle de goût... Le nouveau CEO de Fender est Bob Roback, un spécialiste de la musique en ligne qui a été président de Yahoo Music et CEO de Dashbox. On s'éloigne donc progressivement de l'esprit de la marque, et les artistes paraissent de plus en plus sensibles à ces changements.
De par les gens à qui j'ai pu parler, j'ai appris d'autres affaires en cours qui me laissent penser que l'affaire John Mayer n'est que le début. Un guitariste de rockabilly très fait faire une guitare chez une grande marque d'acoustiques parce qu'il n'était plus satisfait de son endorsement chez les californiens. Le leader d'un groupe rock de Chicago va lui aussi arrêter son modèle signature, et un bassiste endorsé de longue date va lancer sa propre marque sans aucun lien avec Fender. Serait-on à l'aube d'une nouvelle ère CBS au cours de laquelle les nouveautés proposées par la marque seront de plus en plus incongrues et incohérentes, au cours de la quelle la qualité des produits va diminuer et les artistes se tourneront vers d'autres crèmeries ? Une chose est sûre, il y a quelque chose de pourri dans l'empire Fender, et il va être intéressant de suivre l'affaire dans les mois à venir.

Si quelqu'un rachète la marque Hamer, il y aurait moyen de refaire ce modèle ?

3 comments:

  1. Groupe rock de Chicago: Billy Corgan des Smashing Pumpkins?

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  2. il y a en une à vendre chez Guitar addicts

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