Thursday, July 17, 2014

Fantasme 154 - Jackson Surfcaster SC3

http://www.ebay.com/itm/Jackson-Surfcaster-SC3-1996-Year-Made-in-Japan-Very-Good-Condition-Rare-Guitar-/171324760651?pt=Guitar_Accessories&hash=item27e3c0624b

Dans l'idéal j'aurais préféré le modèle sans micro double, mais je n'ai trouvé que ça... Il faut dire que les Surfcaster ça ne court pas les rues en ce moment. Oui, Surfcaster, parfaitement ! Il y a eu une troisième "caster", mais celle-ci était signée Charvel puis Jackson (les deux marques appartenant désormais à Fender, il y a une certaine logique a posteriori derrière tout ça). La forme évoque de loin la Jazzmaster, mais avec l'ouïe de Rickenbacker, les micros lipstick et les repères en dents de requin typique de Jackson, on obtient un mélange parfaitement inédit. à l'origine boudée par le public qui ne s'attendait pas à une gratte de surf rock de la part d'une marque pour métalleux, la Surfcaster commence à revenir dans le cœur des musiciens, au point qu'elle a été rééditée par le Custom Shop Jackson. Malheureusement, beaucoup de ces rééditions reprennent uniquement la forme du corps et en font des guitares de métal plus standard. Vive l'originale donc !

Tuesday, July 15, 2014

Obsédé de Jack White - part 2

Nous avions commencé l'exploration du matos de Jack White la semaine dernière par son pedalboard (en gros : Whammy, Big Muff, POG et de la Fuzz en rab') et sa guitare mystérieuse (une Fender Telecaster American Special modifiée). Passons désormais à l'étape finale de la chaîne... Côté amplis, White est connu pour son utilisation du Silvertone 1485, une vieillerie qu'il a remise à la mode et dont il faut dire qu'il tire un crunch redoutable. Il s'est ensuite mis à le mélanger à un Twin Reverb, et explique dans une interview donnée à Guitar Player : "C'est comme ça que je peux obtenir à la fois le crunch et la reverb. La reverb du Silvertone est horrible, et je l'utilise donc uniquement pour le crunch épais du haut-parleur Jensen que seul un Silvertone peut donner. Aucun autre ampli ne sonne comme ça. J'utilise le Fender pour sa reverb. Un Silvertone et un Fender font une excellente combinaison."
Cette fois pourtant, pas de Twin et pas de Silvertone. L'ampli le plus facile à identifier est le moins facile à voir : il est tourné vers White, en direction du batteur, et on ne le voit que du côté depuis le public. En revanche, en cherchant bien, on peut l'apperçevoir sur certaines photos live, et il y en a même une où on voit très clairement :


 C'est tellement clair qu'on peut même lire le logo de celui du bas ! Il s'agit donc d'un Vibroverb blackface, et il y a donc deux possibilités : soit c'est un original, soit c'est une des rééditions sorties entre 2003 et 2008 sous le nom de '64 Vibroverb Custom. Lorsque la photo est si claire on peut faire la différence en regardant le logo : le sigle TM au dessus de Vibroverb n'apparaît que sur la réédition, et en dessous du nom il y a marqué "Fender Electric Instruments" sur la réédition, contre "Fender Elec. Inst. Co" sur l'original. Il y a aussi une phrase écrite sous le témoin de mise en marche sur l'original qui ne se retrouve pas sur la réédition. Le verdict est donc ici sans appel : il s'agit d'une réédition, le '64 Vibroverb Custom donc. Au dessus, on voit clairement une Fender Reverb Unit, et là, vu qu'on ne la voit que de face, j'aurais du mal à dire s'il s'agit d'une originale ou d'une réédition. Fender ne vend plus la version noire (seule la version brownface reste au catalogue), mais elle a bien existé à partir de 1993.
Restent les trois amplis mystères : trois têtes et baffles qui sont juste derrière White et face au public :


Et là le mystère devient nettement plus épais... Au départ j'ai cru que ces amplis n'étaient pas branchés et qu'ils servaient à décorer la scène (et c'est vrai qu'ils font très bien dans la pièce). Mais lorsque White a remplacé sa Telecaster par la Kay pour le dernier titre, il a trituré les boutons sur ses trois têtes... on peut donc imaginer que le but de ces têtes est d'obtenir le crunch qui venait auparavant de son Silvertone, pour faire pendant au Vibroverb qui remplacerait alors le Twin. Jusque ici c'est assez logique... Mais alors que sont ces têtes ? Une photo permet de les voir un peu plus clairement :


On distingue donc des boutons chickenhead dont la fonction est indiquée par un autocollant au dessus, puis un témoin de mise en marche et un cinquième chickenhead tout à droite qui pourrait bien être un sélecteur de wattage... Il s'agit d'une vieille tête RCA reconditionnée. On trouve plusieurs fabricants, amateurs ou pros, qui achètent ce genre de reliques des années 40 et 50 :


Pour les transformer en amplis parfaitement viables, généralement d'esprit vintage :


Malheureusement, je n'ai pas trouvé de modèle qui corresponde à la répartitions de contrôles des amplis de White, le mystère reste donc entier... S'agit-il simplement de circuits de Silvertone 1485 reconditionnés ? Et si oui par qui ? La quête continue !

Wednesday, July 9, 2014

Fantasme 153 - Gretsch White Falcon / Synchromatic 1958

https://reverb.com/item/72022-gretsch-white-falcon-synchromatic-1958-white

Je connais la White Falcon. Je connais la Rancher, l'acoustique Gretsch à la rosace en forme de médiator qui peut prendre une robe de White Falcon. Mais une version archtop à ouïes de la Falcon, ça je n'avais jamais vu ! Et pour cause : il s'agit d'un modèle unique ! En 1958, un employé de Gretsch a pris un manche de White Falcon, un corps de Synchromatic (l'archtop typée jazz chez Gretsch) et il a appliqué la finition d'une Falcon au corps pour parfaire ce mariage contre-nature. Le résultat est une guitare à la fois très bizarre et parfaitement familière, une combinaison qui a le chic pour me faire craquer... Quand on voit en plus l'état de la bête par rapport à son âge, il y a vraiment de quoi craquer pour cette véritable pièce de musée.

Monday, July 7, 2014

Obsédé de Jack White - part 1

Ok, l'obsession ne date pas d'hier : j'avais déjà fait un article sur les guitares de son groupe The Raconteurs en 2012 (l'article est là), mais avec le merveilleux album Lazaretto ça ne s'est pas arrangé. J'ai eu la chance de voir la première des deux dates de White à l'Olympia pour cette nouvelle tournée, et je n'ai aucun doute sur le fait que c'est le meilleur concert que je verrai cette année. En grande partie improvisé, avec une excellente sélection de morceaux de tous ses projets, et un groupe furieux derrière...
Mais vous vous en doutez, j'avais aussi les yeux rivés sur le matos et... je n'ai rien vu. Comme tout bon magicien, White cache ses astuces, et le matos clairement identifiable sur scène est bien rare. Pour ne rien faciliter, il ne donne pas d'interviews... Deux pages internet peuvent nous éclairer, mais elles sont déjà vieillottes : cette interview avec Guitar Player en 2010 et cette compilation de photos de ses pedalboards. Mais il y a une source moins évidente qui peut donner quelques indices à condition que l'on fouille un peu : il s'agit des photos des concerts de White, prises par son équipe et mises en ligne quelques heures après chaque show.
Commençons par le plus simple : les pédales. La compilation de photos présente une photo du pedalboard de la tournée solo précédente, et à priori peu de choses ont changé.
Voici l'ancienne photo :
et un gros plan sur les pédales qu'on aperçoit sur une photo live
:
Au fond, on retrouve bien la Whammy, puis la Big Muff (la plus grosse avec les trois boutons), un POG 2 (avec les sliders + le bouton blanc), et c'est là que le mystère commence... Le switch à gauche appartient peut-être à la MXR Micro Amp qui se trouve sur tous ses boards quel que soit le projet. Et avant sur l'alim il y avait une Woolly Mammoth ZVEX, mais le bouton qui dépasse tout à droite n'est pas celui d'une ZVEX... Si l'un d'entre vous arrive à l'identifier je suis tout ouïe. Quant aux deux dernières pédales visibles en entier, il y a une noire à deux boutons et une verte sans aucun bouton. Pour la verte, je parierai très cher qu'il s'agit de la Bumble Buzz, la fuzz qu'il a conçue et sortie sur son label Third Man : http://jackwhiteiii.com/third-man-records-bumble-buzz-guitar-pedal/ . La pédale noire en revanche est clairement une pédale de série puisqu'on voit le petit autocollant "ne pas jeter à la poubelle" qui orne les pédales neuves, non ? à vous de me dire ce que ça vous inspire...
Côté guitare ensuite, il y a les évidentes, à savoir la Gretsch qu'il avait dans les Raconteurs, la Gibson L-1 de 1915 en acoustique et l'archtop Kay des années 50 en open de La pour Seven Nation Army. Mais la véritable star du show et celle qu'il n'avait pas avant de se lancer en solo, c'est la Telecaster bleue. Et là, impossible de savoir quoi que ce soit : certains forums parlent d'un modèle de 68, mais ça n'est pas basé sur grand chose d'autre que la présence d'un Bigsby... Que sait-on ? Elle a un armrest métallique façon star de la country, un Bigsby, un humbucker en position manche avec plots apparents façon TV Jones et tout l'accastillage est blanc. Les mécaniques ressemblent à des Sperzel à blocage. On pourrait penser qu'il s'agit d'une création du Custom Shop Fender, mais cette photo dit le contraire :

(oui il fallait la trouver celle-là...) Même sur les guitares de stars (surtout !), le Custom Shop appose toujours son petit aigle à l'arrière de la tête. Là ça ressemble beaucoup plus au numéro de série d'une Fender. On voit clairement qu'il y a deux lignes superposées, ce qui limite énormément les possibilités puisque beaucoup de leurs modèles ont soit le numéro de série (pour les mexicaines standard) soit le Made In USA (pour les américaines standard) à l'avant de la tête. Les seules à avoir deux lignes superposées sont les mexicaines Classic Player et les American Special. Peut-être que le logo à l'avant peut nous donner un indice ? Il s'agit du gros logo noir des années 60, qui a laissé croire à certains "experts" qu'elle était de 68. Vous savez quoi ? C'est exactement ce logo que Fender a choisi pour l'American Special !!! L'étau se resserre donc de manière très claire : il s'agit bien d'une Fender Telecaster American Special, modifiée copieusement ! On ne saura pas jusqu'où est allée la modification (peut-être même que le corps vient d'une autre guitare, allez savoir...), mais on avance !
ça fait beaucoup pour une séance, alors on réserve les amplis pour la prochaine, d'ici là menez l'enquête de votre côté et on se retrouve dans une semaine pour confronter les résultats...

Wednesday, July 2, 2014

Fantasme 152 - Gibson L7CES

http://www.gbase.com/powered/geardetails.aspx?dealer=0fd3852e-463b-4738-b6ad-2476311d28d7&item=3265612

Tout le monde connaît la L5, le grand classique des archtops de luxe, le Saint Graal de n'importe quel jazzeux mais qui fait aussi fantasmer pas mal de bluesmen, de country boys ou de rockeurs... Mais il y aussi la L7, introduite plus tard au catalogue Gibson et qui s'en rapproche dangereusement. Selon les années, la différence entre les deux références est uniquement la décoration, ou le fait que la 5 a une touche ébène et la 7 une touche palissandre, ou encore que la 5 est en érable et la 7 en bouleau. Mais cette belle pièce de 1951 n'est pas seulement une archtop à tomber par terre : elle est électrifiée ! Gibson n'a pas encore inventé le humbucker, et il s'agit donc de deux P90, mais pas n'importe lesquels...
Vous avez déjà remarqué que certains micro sont flottants sur le archtops ? L'explication est ultra simple : si un micro est installé dans la caisse d'une archtop, cela sous-entend de creuser un trou dans la caisse, donc pas bon du tout pour la résonance à vide. Le micro flottant est la solution à ça, mais Gibson a aussi expérimenté dans une autre direction avec cette bizarrerie : le micro "repose doigt" (finger rest), généralement appelé McCarty. La plaque se prolonge sous les cordes avec des plots qui trahissent le procédé. Regardez de plus près, c'est très spécial :


Classe non ? Et pour les ultrasnobs qui voudraient installer ça sur leur archtop, eh bien Lollar propose une réédition du McCarty ! Si, si : http://www.lollarguitars.com/blog/2009/09/lollar-mccarty-style-pickup-for-archtop-guitar/
Étonnant, non ?

Tuesday, July 1, 2014

Fender : le prototype mystère

Eh oui, c'est une Fender, parfaitement ! avouez qu'on a vu moins bizarre... Le plus bizarre est ce qu'elle prétend être... Voici l'annonce envoyée par Benjamin, excellent guitariste et un putain de graphiste (responsable du visuel de Carrots and Peas, c'est dire !) :
http://www.ebay.com/itm/1956-Fender-Swinger-Arrow-Musiclander-PROTOTYPE-Mustang-Stratocaster-Only-1-/301207425509?pt=Guitar&hash=item46215c91e5
Il s'agirait donc d'un prototype de Fender Swinger qui daterait de 1956. Un peu d'histoire tout d'abord : la Fender Swinger est un modèle apparu en 1969, qu'on retrouve parfois sous le nom de Musiclander, aussi surnommé "Arrow" (la flèche) en raison des formes pointues de son corps et de sa tête. Cette guitare, fabriqué à très peu d'exemplaires, était une tentative d'utiliser des pièces déjà employées pour fabriquer des guitares qui ne se vendaient pas à l'époque, comme la Bass V pour le corps (oui, une basse cinq cordes, sauf que la 5e était aiguë) et la Musicmaster pour la tête.
Le magasin Island Guitars (qui paraît parfaitement légitime, ils ont pas mal de belles pièces au catalogue : http://www.gbase.com/stores/island-guitars-and-teaching-studios) propose donc cette guitare, qui serait un prototype de 1956 ! L'idée serait donc que Léo aurait déjà conçu cet instrument 13 ans avant sa mise en production, et 9 ans avant le rachat par CBS. Bizarre non ? Le gros problème, c'est que Island ne propose aucun certificat d'authenticité, aucune photo d'époque ou aucune expertise de spécialiste du vintage pour prouver qu'il ne s'agit pas d'un faux.
Quels éléments donneraient envie d'y croire ? Il y a d'abord le manche daté de juin 1956, et surtout l'usure des mécaniques et le logo de tête qui collent bien avec la date annoncée. Il y a aussi le sunburst deux tons, typique des Fender d'avant 1959 (même si ce sunburst là tire un peu beaucoup sur le orange, mais avec l'exposition aléatoire aux UV pourquoi pas), et le micro annoncé comme un micro de Strat d'époque, ce qui prouverait bien qu'il a été pris dans le stock existant pour donner une existence électrique à ce bout de bois. Il y a aussi le nom "Musiclander" sur la tête, qui donne vraiment l'impression d'avoir fait partie de l'instrument dès le départ...
Les éléments qui posent problème ? Alors déjà il y a la plaque de protection, un style de plaque que l'on ne retrouve chez aucune autre guitare Fender à l'époque. Idem pour les boutons, qui sont plutôt des boutons de pédale boutique actuelle : pourquoi est-ce qu'un prototype n'aurait pas eu droit à des boutons de Telecaster ou de Stratocaster ? Encore plus suspect : le corps est lui aussi daté de juin 1956, comme par hasard !


On sait à l'heure actuelle que l'organisation à l'usine Fender de l'époque était assez anarchique et que les bizarreries de datations étaient courantes. Le fait qu'un corps et qu'un manche datent exactement du même mois paraît un peu gros... Plus grave encore : la partie dans laquelle le manche vient s'encastrer a été peinte, alors que sur les modèles d'époque cette partie restait nature puisque c'est là qu'on mettait le manche pour tenir le corps lors de la peinture. Regardez par exemple sur ce modèle datant aussi de 1956 :


Alors comment expliquer le manche daté si crédible et le micro de Strat ? Pour le micro rien de plus facile : il s'agit du genre de pièce détachée qui se vend très bien sur ebay. Pour le manche, il pourrait s'agir d'un vrai manche de Duo Sonic (qui existait déjà en 1956, donc daté comme ça, avec ce logo et ces mécaniques) qui aurait été découpé pour parvenir à cette forme, auquel cas il y a eu un revernissage. Ou bien il s'agit d'un faux intégral avec des mécaniques authentiques...
Difficile de trancher de manière définitive sans avoir la bête entre les mains, mais il y a quand même de gros risques pour qu'il s'agisse d'une forgerie. à 9500 dollars, ça fait un peu mal. Si vous avez d'autres hypothèses ou que vous avez remarqué des détails qui ont échappé à mon observation faîtes-moi signe ! Comme souvent, pour les chasseurs de guitares de collection, knowledge is power.