Wednesday, June 18, 2014

Jeff Beck sur scène

Je sais, les concerts de Jeff Beck commencent déjà à dater et nous ne sommes plus dans de l'actualité brûlante. Mais je me permets quand même un petit papier... J'ai eu la chance de voir le grand Jeff à plusieurs reprises sur scène, et surtout de le voir plusieurs fois de suite. Avant d'en arriver aux deux dates récentes, un petit mot sur les dates précédentes : je l'ai d'abord vu au Zénith de Nantes le 9 Octobre 2010 (super show mais ambiance un peu froide vu la grandeur de l'endroit), puis à l'Olympia le 11 (en demi-teinte, les places étant très chères et le public pas ultra enthousiaste, Jeff en moyenne forme) et enfin à l'Ancienne Belgique de Bruxelles le 12 (une superbe salle avec plein de bois partout où presque tout le monde est debout), et là c'était de loin la meilleure du lot, très enthousiaste et détendue de la part du public comme du groupe.
Nous voilà quatre ans plus tard, et Jeff reprend la route. La date au Grand Rex le 27 mai est annoncée, je me précipite sur une place, et je décide de me faire aussi l'Ancienne Belgique la veille étant donné l'excellent souvenir de la date de 2010 là-bas.
La date de Bruxelles est l'occasion de se familiariser avec toutes les nouveautés de cette tournée. Les musiciens d'abord, puisque seule l'excellente Ronda Smith est restée dans le groupe (d'habitude j'ai horreur du slap mais je reconnais qu'elle le fait ultra bien). Les deux nouveaux amènent vraiment quelque de chose par rapport aux précédents et il s'agit d'une de mes formations préférées. à la batterie, Joanthan Joseph, issu du gospel et de la soul, assoit l'ensemble de manière plus stable que Colaiuta et moins bourrine que Walden. Plus de clavier, mais cette fois-ci un guitariste, et pas des moindres : Nicolas Meier, le virtuose suisse que l'on a pu découvrir dans le groupe de métal progressif Seven7 ou en solo dans un registre world acoustique. Comme Jennifer Batten avant lui, il alterne entre sons électriques et sons synthétiques pour les nappes dont Jeff ne peut pas se passer. Se familiariser avec le répertoire ensuite, puisque très peu de morceaux sont restés de la setlist de 2010 (quelques classiques comme Big Block ou Cause We've Ended As Lovers), et il y a même pas mal d'inédits : Loaded qui ouvre le show, Why Give It Away, Danny Boy (on retrouve ces trois titres sur l'EP japonais Yosogai qui vient de sortir), Nine et Egyptian (deux nouveaux titres pas encore sortis), Little Wing de Hendrix (introduite par un sublime solo de Meier sur une Multiac acier 12 cordes), You Know You Know du Mahavishnu Orchestra et Yemin (une reprise d'un titre solo de Nicolas Meier). La couleur générale est donc plus barrée, plus rentre-dedans et moins contemplative que sur la tournée 2010. Les fans du Beck jazz-rock sont aux anges, et ceux qui comme moi souhaitent le voir continuer d'évoluer apprécient ce tournant légèrement oriental qui lui va si bien. Le temps de comprendre ce qui se passe et hop, c'est parti pour le Grand Rex.
Étant donné la différence entre Paris et Bruxelles en 2010, je n'attendais pas énormément de ce concert, et les fauteuils ultra confortables n'incitaient pas vraiment à l'émeute. Pourtant, cette date était à mon humble avis la meilleure des deux : le son était excellent, la chanteuse franco-britannique Sophie Delila était une belle surprise (elle chante sur la version studio de Why Give It Away), et surtout les musiciens étaient un peu plus libres dans leurs interprétations (notamment Joseph dont chaque break passait comme dans du beurre). Beck lui-même était plus à l'aise, et tentait plus de choses. C'est d'ailleurs la principale leçon que je retiens de ces deux concerts : j'ai entendu Jeff Beck se planter, essayer des choses, trouver des choses, et jouer deux concerts radicalement différents. Des fois ça marche, des fois ça ne marche pas, mais ça ne l'empêche pas d'essayer, et je pense qu'il s'agit là du secret du bonhomme. Pourquoi joue-t-il si bien ? Parce qu'il n'a pas peur de se mettre en danger et de continuer de chercher de nouvelles manières de jouer ses morceaux quarante ans plus tard. Autre leçon subsidiaire : on ne le dira jamais, le son est dans les doigts. La Strat de Beck n'est même pas une Custom Shop, et son ampli est un Marshall JCM2000 dont personne ne voudrait à 400 euros sur le bon coin. Et pourtant c'est un des plus beaux sons qu'il m'ait été donné d'entendre. Merci.

7 comments:

  1. Tu as tout dit : "dans les doigts". LE MAITRE!
    J'étais à l'Olympia, et le souvenir des premières notes de "Where were you" rhâ!!! C'est donc un être humain qui fait ça avec une guitare et un ampli... et ses doigts. Je suis un peu vieux (jeu?) et pour moi le summum guitaristique reste la partie de guitare de "Shapes of things".

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    1. J'adore Shape Of Things mais de mon côté, je suis de plus en plus fan à chaque album, j'ai l'impression qu'il progresse encore...

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    2. Ce n'est pas - bien entendu - le niveau guitaristique, qui me gêne. JB est définitivement le plus grand. Mais qui aime bien... Avec le recul, je trouve que la trilogie techno vieillit mal... quant au dernier album, son contenu musical est insupportable de ringardise. C'est vraiment dommage de mettre autant de génie à jouer du Clayderman. Il doit retrouver un compositeur/arrangeur à sa taille.

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    3. Là dessus je suis tout à fait d'accord avec toi... J'adorerais l'entendre en trio sans claviers ou deuxième guitare, produit par un mec comme Rick Rubin qui ne le laisserait pas faire n'importe quoi...

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    4. Ah ouais, Jeff Beck. Ce que j'aime le plus chez lui, ce sont ces pochettes de disques et son style vestimentaire... Ok, je rigole.
      Je l'avais vu autour de 1999 au Grand Rex et c'était cher, 210 francs, c'était un tarif de luxe pour un étudiant franchement sorti de son service nationale, plus le trajet en voiture.
      Bon, maintenant, c'est un tarif que l'on considère "normale", mais là n'est pas le propos.
      Enfin, toujours était-il que sa performance était très moyenne et sans grand éclat. Et je n'attendais plus grand chose de lui après ce concert, mais il a fait des concerts mémorables depuis (où je n'étais pas, malheureusement, dont un au Festival de Jazz de Montréal d'il y a quelques années), et le disque live at Ronnie Scott's m'a mis à terre
      Alors, oui, j'aime sa prise de risque, mais ça va donne avec les concerts sans saveurs. Et des disques complètement irréguliers, le dernier brillant particulièrement par son insignifiance.
      Et ça reste mon guitariste de référence, pas particulièrement obnubilé par le matos mais plus par le phrasé et le style.

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    5. Oui, c'est sûr que sa production discographique manque un peu de focus mais ça n'est pas vraiment le plus important : il suffit de tomber sur un bon moment d'un de ses concerts et ça justifie tout le reste aussi sec !

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  2. Un JCM 2000! Incroyable!

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